Capture d'écran durant l'épisode 9

Knights of Sidonia: Battle for Planet Nine

La bataille pour la planète Tanikaze est quasi-naze.

Publié le 21 septembre 2018, écrit le 2 octobre 2015 - Animation

Il faut bien comprendre une chose: la grande force de Sidonia no Kishi, c'est l'espace. C'est l'univers, ce vide intersidéral qui défie l'entendement, cette réalité qui pourrait être infinie et en majorité inexplorée et inexplorable. C'est ce postulat de départ qui place des humains à bord d'un vaisseau-météore, emprisonnés et si minuscules, créant ainsi un rapport de force et d'échelle entre eux, si petits, si misérables, et ce qu'il y a là-dehors, ces Gaunas, si grands, si effrayants, peuplant peut-être par milliers les recoins des galaxies. Et c'est de ce constat qu'est générée l'attention, la tension: face à ce qui semble être une situation initiale perdue d'avance, devant tant de probabilités négatives, tandis qu'on regarde les vies humaines partir en poussière sur les écrans, à peine barrées d'une croix rouge sur le HUD, simples statistiques et autres chiffres sur les terminaux, on se prend au jeu, on tremble avec eux à chaque sortie dans l'espace, on se demande si ils vont tous revenir vivants, sains et saufs. C'est une loterie permanente dans une guerre qui n'est pas équilibrée de toute façon. Les Gaunas semblent aller de pair avec l'espace, les deux sont infinis. Les ressources du vaisseau, quant à elles, ne le sont pas, que ce soit au niveau des humains qu'au niveau du matériel. La force de la série est là, dehors, au loin.

Pourquoi donc la série a-t-elle pris ce tournant si désastreux dans cette deuxième saison et a décidé de se concentrer sur le dedans, sur les personnages, au point de les rendre apathiques et fatalement ennuyeux ? Que s'est-il passé lors du changement de saison ? On sentait, et je l'avais déjà souligné à la fin de la première volée d'épisodes, qu'il fallait approfondir un peu plus les caractères des individus en scène pour l'instant trop effacés, trop anecdotiques. On sent avec cette deuxième saison qu'ils ont essayé de rectifier le tir et de développer les personnages. Il y avait cent mille façons de le faire, et tout anime qu'il est, Sidonia no Kishi a parié sur la façon "harem". Mauvaise pioche.

Mauvaise pioche parce que jusqu'aux trois-quarts de cette deuxième saison on se retrouve avec des triangles, des carrés, des hexagones amoureux qui loin d'être innovants ou avant-gardistes (n'est-ce pas de la science-fiction après tout ?), sentent au contraire le réchauffé et le conformisme. Que pouvons-nous dire de la transition, ô combien convenue et bien-pensante, d'Izana Shinatose qui choisit de devenir une fille parce que je cite, "If you've chosen to be a woman, it means you've found a man!" Parce que nous ne voudrions pas sortir du carcan sacro-saint de l'hétéro-normativité des harems dans les animes japonais, n'est-ce pas, quand bien même l'anime en question, une oeuvre de science-fiction donc, posait en postulat de départ l'existence d'un troisième genre neutre, de la reproduction par photosynthèse et le clonage avancé ? Parmi toutes ces avancées technologiques, tous ces changements de structure sociétale et humaine, il semblerait qu'une femme soit toujours liée à un homme, c'est ainsi, et les Gaunas peuvent bien rire de là où ils sont devant tant de traditionalisme. Dans l'espace, personne ne vous entend crier face à un énième gâchis scénaristique. Il faut bien pouvoir caser quelques panty shots et deux trois bains afin d'exposer les nouveaux implants mammaires d'Izana, c'est de bonne guerre.

Capture d'écran durant l'épisode 4

Et ce n'est pas comme si la transition d'Izana en concubine du couvent de Tanikaze soit justifiée ou justifiable d'une quelconque manière; en effet, le garçon a déjà suffisamment de prétendantes qui n'ont d'yeux que pour lui. Pas la peine de rajouter Izana dans l'équation. Entre la nouvelle venue, une chimère qui n'a de chimère que de nom puisque son comportement est plus proche d'une lycéenne que d'une créature résolument différente, Yuhata Midorikawa la XO qui s'incruste dans l'histoire pour aucune raison valable ou bien encore les sœurs Honoka (22 au total bien qu'on se concentre sur 2 d'entre elles), Tanikaze a le choix. Seulement voilà, il y a un problème: on n'en a que faire. Vraiment, sincèrement. Si je voulais regarder un anime avec un harem et des angles de caméra inappropriés, je regarderais Rail Wars!; si je voulais voir Izana rougir à la moindre interaction avec l'homme de sa vie, je regarderais Fruit Basket; si je voulais avoir affaire à un personnage masculin qui n'a aucune idée de quoi faire avec toutes les filles autour de lui, je regarderais...non je ne regarderais rien, tout compte fait, parce que le genre ne m'intéresse pas.

L'enjeu de la première saison était la survie de l'humanité, la découverte de la menace Gauna, la mort tragique d'Hoshijiro, le traumatisme de Tanikaze, sa lente reconstruction à travers l'étrange relation qui s'était construite entre lui et le placenta, la question sur ce que c'est d'être humain, dans ce futur si déshumanisé, où tout le monde est un clone et où un comité d'immortels semble régner en maître sur le vaisseau.

L'enjeu de la deuxième saison, pour la majorité des épisodes, est de savoir si Tanikaze va finir avec Izana, la chimère ou une fille lambda aléatoire qui se présentera à lui par la suite. Merci, au revoir.

Pouvait-on faire autrement, cependant ? En éliminant dès le début de la saison à la fois le comité d'immortels et Kunato, effaçant ainsi par la même occasion le seul protagoniste qui affichait un quelconque désintérêt pour Tanikaze, voire même de l'hostilité, Sidonia no Kishi se transforme en chambre d'écho sans véritable antagoniste. Restent les Gaunas, mais justement, les Gaunas, on les a trop vus. Alors quoi ? Alors on remplace Kunato, celui qui aurait pu faire des mauvais coups, créer un lien de rivalité avec le pilote de génie qu'est Tanikaze, par une marionnette, une vague histoire de possession, de ver qui se balade dans les yeux et de recherches inabouties. Lui qui était ouvertement hostile au héros, le voici qui lui parle comme si de rien n'était, et personne ne se soucie pour le moins du monde de ce changement de personnalité. Sans Kunato, Tanikaze a le champ libre pour être le seul protagoniste masculin important de l'histoire. Sans le comité d'immortels, Kobayashi a le champ libre pour faire ce qu'elle veut. Sans Gaunas à l'horizon, le vaisseau entier a le champ libre pour devenir un terrain de jeu. Au programme: exploration de tuyauterie en compagnie de la chimère phallique, visite de jardins où les cerisiers sont en fleurs, bains à tout-va et séance d'essayage de robe vaguement SM. Excusez-moi, mais je baille. Je baille et je soupire.

Reste une fin de saison qui revient tant bien que mal à ce qui fait la force de la série. L'espace. Les Gaunas. Les situations désespérées. Les retournements de situation. Une exploitation des CGI pour faire des scènes d'action explosives, des mouvements fluides, des chorégraphies aériennes. Ça, c'est Sidonia. Le changement de ton et d'ambiance entre la première et la deuxième saison est saisissant, flagrant. C'est définitivement en train de virer au négatif pour ma part, et je ne continuerai pas la série si elle persiste à vouloir mettre de la romance futile et du conservatisme partout. Ce n'est pas ce que je recherche dans une oeuvre de science-fiction. Maintenant, est-ce la faute de l'adaptation en anime qui a exagéré le côté harem ou bien est-ce directement dans le manga original qui n'a pas su maintenir un cap correct ? Je ne sais pas, mais il va falloir revoir tout ça pour la prochaine fois.